Une histoire de glaçon

Publié le par Manu

Une histoire de glaçon

J'ai la nausée. Peut-être est-ce encore ce foutu microbe qui s'accroche à mon corps ou cet homme qui m'a regardé droit dans les yeux et m'a dit dimanche dernier «  Tu me dois le respect ». Tout cela pour un glaçon.

Il fait moins cinq degrès à seize heures et je dois avaler mes médicaments, me doper de tisanes et penser à autre chose. Mais à quoi. A quoi bon. Ce type, déjà frigide à mon égard lors de nos premières conversations, semble vouloir errer dans mes cauchemars, à me maudire, traumatiser mon cerveau caduque et enflammé. Il y avait pourtant une étincelle quelque part, lorsque j'ai proposé la galette des rois. Oui cette foutue galette ou je suis devenue reine. Peut-être est-ce donc cela, il n'a pas apprécié perdre la couronne ! A bien y réfléchir, il s'en foutait, comme du reste du monde, comme de son petit-fils qu'il a laissé se cogner la tête contre une table à bouts pointus. Et il n'a pas bougé, il est resté comme un sac de bûches devant sa cheminée. Il s'est sans doute fendu la poire en voyant ce gamin de vingt et un mois se casser la gueule devant lui. Ce petit fils qu'il n'aime pas car il est différent.

Nous n'étions pas là, nous, ses jeunes parents. Il nous avait envoyé «  faire un tour ». Et on a retrouvé notre enfant le menton en sang, gémissant et cherchant les bras de sa maman. Rien, rien pour l'apaiser. Ils auraient pu, eux, grands-parents déposer délicatement un onguent comme le faisaient nos grands-mères avant … ou un glaçon.

Un putain de glaçon.

Alors, mon fils dans les bras, j'ai osé demander ce foutu glaçon.

Et il a pété les plombs.

Ils ont été parents avant nous, ils savent que çà sert à rien, putain un glaçon, pourquoi tu veux un glaçon, et me parle pas comme çà, tu me dois le respect, je t'en foutrais un glaçon moi …

Je sens encore le petit cœur de mon enfant contre ma poitrine, comme un compte à rebours …

 

1,2,3. Nous devons partir. Aller, mon Amour, quittons cette maison qui t'a vu grandir car aujourd'hui, deux vieux fous y vivent et nous engueulent parce que j'ai osé demander un glaçon pour apaiser la douleur de mon fils.

Cela va bien plus loin que ce glaçon. Tu le sais. J'écris entre les lignes, comme toujours, je suis intrépide, funambule entre les mots. Je t'aime et notre amour est plus fort que cela. Que tous les mots de haine qu'à pu déverser ton père ce jour là.

Il n'aura pas ma haine celui-ci, ce type misogyne qui n'aime pas qu'une jeune femme s'exprime et qu'elle lui dise le fond de ses pensées.

Oui, une jeune femme, çà pense. Une jeune femme, de nos jours, c'est libre, désanchaînée. Non, je ne me laisserai jamais faire, non, vous ne me parlerez plus comme vous l'avez fait. Non, je ne suis pas la «  bonne femme » de votre fils.

L'époque ou vous pouviez parler comme cela à n'importe quelle femme, à votre femme, est révolue. L'époque ou vous pouviez frapper et malmener une jeune femme sous pretexte qu'elle prenne soin de ses enfants, est révolue. L'époque ou vous achetiez les gens avec votre fric pour les faire revenir, c'est révolu aussi.

Vous ne m'impressionnez pas. Moi, la jeune mère qui vous regarde droit dans les yeux en vous disant «  C'est mon fils, je fais ce que je veux », je vous crâche à la figure ce foutu glaçon.

Publié dans Entre les lignes, Les mots

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